AccueilVélo électriqueLe vélo est nul ! Il n'a pas changé le monde comme l'automobile

Le vélo est nul ! Il n'a pas changé le monde comme l'automobile

Dans un monde façonné par la puissante automobile, le vélo est le vilain petit canard de la famille. Frêle, fébrile, lent, silencieux, compliqué, peu confortable, il ne cadre pas avec l’esprit « prolongation de son chez soi » propre à la voiture. Il fait courber l’échine, il salit les pantalons, il oblige à s’essouffler, à se fatiguer et parfois à transpirer, en nous exposant aux contraintes extérieures.

Sur un vélo, on ne ressemble à rien. Au mieux, on tentera un style casual sur un modèle hollandais, la moustache soyeuse, les mocassins fraîchement nettoyés. Au pire, le cuissard nous fait ressembler à une aubergine glissée dans un préservatif sous-dimensionné. Impossible d’être coude à la portière, clope au bec, bras fièrement tendu en haut du guidon. On finirait par terre, l’air malin.

Le vélo a eu différents moments de gloire, mais il s’est fait seul contrairement à l’automobile. Et pour cause, ce ne sont pas des usines de vélos qui ont servi à la création de munitions pendant les deux guerres mondiales, forçant les politiques à remercier les entreprises qui ont su répondre présentes. Point de lobby pétrolier, immobilier ou bancaire, afin de le rendre financièrement attractif. Point de dictateur fasciste pour lancer un vélo du peuple, qu’il soit italien ou allemand.

Il n’a pas été non plus question de supprimer les tramways pour favoriser le passage des vélos sur les voies. Ni de cloîtrer les enfants s’amusant à l’extérieur dans des bandes de bitumes légèrement surélevées, pour qu’ils arrêtent de crever sous les roues des gens trop pressés. Le vélo n’a pas eu droit à des villes construites pour l’accueillir et le laisser circuler, ni à d’énormes bâtiments pour les ranger.

Le vélo n’a pas été rendu cool au cinéma, dans des courses entre deux ados en excès d’hormones, entre flics et gangsters américains en excès de testostérone, entre gentils et méchants s’affrontant sans vraie raison, dans une licence devenue monotone.

Puis, il est difficile d’avoir des ébats sexuels sur un vélo et monter à deux dessus demande un minimum d’équilibre, un exercice périlleux lorsqu’il est effectué en tandem.

Le vélo n’a pas eu droit à son code de la route, à ses règles de circulation, à ses feux lumineux, à ses voies d’insertion et à ses barrières de sécurité.

Il n’a pas vu les villes sortir de terre et les bâtiments s’ériger pour lui rendre grâce, et il a mis 50 ans avant d’avoir le droit, lui aussi, à sa place de parking.

Le Bronx n’a pas tranché par une piste cyclable, tuant de facto le quartier populaire et cosmopolite.

Le vélo ne permet pas de traverser de grandes et vastes étendues sans pouvoir en admirer réellement le décor, faute de sortir de la route et finir dans un ravin ou un arbre.

Le vélo n’a pas eu droit à sa pub dans laquelle l’homme riche a le vélo, donc il aura la femme.

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Aucun constructeur de vélo n’a vu son CA atteindre les 23 milliards de dollars, et à aucun moment, 7 700 000 personnes n’ont été dépendantes d’un seul des fabricants. Le Covid lui a donné des ailes faites de billets de banque, mais il n’a guère su voler très haut et très longtemps.

Le vélo n’est pas devenu le moteur de la transformation du monde et son utilisation n’a pas justifié de complot, de guerre et de renversement de pouvoir.

Le prix de l’énergie servant à déplacer le vélo ne fluctue pas suffisamment pour déclencher des crises économiques, des crashs boursiers et des coups d’états.

D’ailleurs, le vélo n’a pas réussi à réchauffer les cœurs, en augmentant la température de la planète de 1,5 degré.

Le vélo a pourtant ses exploits. Fabriqué principalement en Chine, il subit les lois du marché et se permet de grands voyages à bord d’énormes bateaux. Il a désormais droit à ses défenseurs, à ses lobbys, à ses mouvements politiques et à son marché de plusieurs milliards d’euros.

Le vélo est aussi le grand gagnant des pays en voie de développement et le véhicule préféré des personnes sans liquidité. Mais même elles ont fini par le trouver nul. Le contraignant à émigrer vers les quartiers huppés et métropoles riches décomplexées, afin qu’il laisse la place à sa grande ennemie, la bagnole. Elle qui file comme le vent conquérir le cœur, le portefeuille et l’atmosphère de ceux qui, faute de moyens, jadis, pédalaient.

L’Inde espère ainsi dépasser le seuil de 30 véhicules pour 1000 personnes. L’Indonésie aussi va troquer les pédales du vélo pour celles de l’automobile. Ce n’est pas le biclou qui saura éradiquer les 50% de forêt primaire pour la création d’infrastructures routières. Ce n’est pas lui non plus qui permettra des développements économiques rapides et massifs de lieux jusque-là financièrement reculés, en puisant dans des ressources rares et limitées.

Le vélo est nul. Il ne sert qu’à distraire le retraité passant le temps, supporter le daron qui amène la marmaille à l’école, déplacer la jeune cadre CSP+ en tailleur Versace à son open space, traîner le lycéen nostalgique des années 80 (qu’il n’a pas connues) au bahut, animer le sportif en cuissard dès 6h du mat, ou supporter la grand-mère qui va faire ses courses en tapant un wheeling à la sortie du magasin. Le vélo ne sert qu’à esquisser des sourires et décrasser le palpitant. Le tout dans un silence assourdissant. Enfin presque. Désormais, le vilain petit canard sait donner de la voix, à coups de pédales certes, mais à coups de milliards, d’après les habitués de l’or noir, qui y voit non pas un véhicule intéressant, mais une rente persistante.

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