Délégué au plan climat et à la durabilité dans sa commune suisse près de Lausanne, Stanislas Gouhier a voulu tester la faisabilité d’un long voyage en France avec une moto électrique. Il s’attendait à vivre quelques galères pendant le parcours de 4 000 km réalisé en 3 semaines. Quel bilan en tire-t-il finalement ?
Ca fait déjà un peu plus d’un an que Stanislas Gouhier a réalisé son voyage dans l’Hexagone, entre le 13 et le 30 juillet 2021. Mais c’est actuellement qu’il communique dessus, en déposant progressivement depuis environ un mois une série de 11 vidéos sur sa chaîne Youtube Rastan CH.
« Le tout prochain film [NDLR : Short Way Round 5] présentera ma boucle en Bretagne. Les mises en ligne vont s’étaler jusqu’au 3 octobre prochain », précise le jeune motard.
« Avec cette série de vidéos, j’avais envie de transmettre mon expérience à ceux qui n’ont pas encore voyagé en électrique et qui souhaiteraient le faire. Je les encourage dans ce sens. Et puis je n’aime pas trop accumuler des photos. Ces petits films vont aussi me permettre de conserver le souvenir de cette aventure », complète-t-il.
« Au départ, je devais réaliser ce tour de France en 2020, mais pas avec une moto électrique. J’avais envie de rendre visite à des amis et de la famille que je n’avais pas vus depuis des années. Mais la crise sanitaire m’a obligé à reporter mon périple », explique Stanislas Gouhier. « Alors, sur un coup de tête, j’ai passé mon permis moto à la fin de l’été 2020, en me promettant que ce serait pour avoir une électrique. Voilà comment mon projet a évolué. Elle est donc ma première moto. Auparavant, en véhicules électriques, je n’avais fait que d’essayer les Renault Zoé et Twizy », avoue-t-il.
« Mon choix s’est rapidement porté sur une SR/F de chez Zero Motorcycles. C’est pour moi la plus aboutie des motos électriques avec l’Energica. Mais cette dernière est davantage typée sportive et son design me plaît moins », compare-t-il.
En partant de Vevey qui abrite le siège mondial de Nestlé, notre interlocuteur a effectué une première étape majeure à Strasbourg. Avant de se rendre à Verdun, il est allé saluer à Nancy la fameuse place Stanislas construite en son honneur. En tout cas c’est lui qui le dit avec grand humour. Direction Paris pour une petite balade sur les Champs-Elysées, puis Romorantin, afin de faire un peu plus tard un petit tour au Mont-Saint-Michel.
Il a repris sa machine pour la Bretagne avec un court séjour à Brest puis à Vannes. « J’ai bien aimé visiter la Vallée des Saints à Carnoët, et retrouver le fort la Latte où j’allais quand j’étais enfant », commente le motard suisse. Evoluer silencieusement vers les étapes suivantes de Bordeaux et Toulouse l’a également séduit : « Je suis passé par de petites routes départementales qui m’ont fait traverser des villages médiévaux ».
En France, il est encore passé par Montpellier et Montélimar avant de s’offrit une escapade en Italie par le col du Petit-Saint-Bernard. En quittant Aoste, il s’est redirigé vers la Suisse. « J’ai dépassé les 4 000 km en revenant à Vevey », souligne le baroudeur.
« J’ai reçu ma Zero SR/F en septembre 2020. Elle est équipée d’une batterie d’une capacité énergétique de 14 kWh que je peux recharger à 12 kW grâce à un pack en option », détaille Stanislas Gouhier. Pour effectuer un périple d’une vingtaine de jours avec une moto, il faut forcément être astucieux et effectuer des choix. C’est ce qu’a fait notre interviewé en enroulant les câbles de recharge derrière les coffres latéraux.
Et pour le couchage ? Un simple hamac à étendre entre 2 arbres dans les campings où il a séjourné, recouvert d’une bâche imperméable. Un peu spartiate ! « Je me suis tout de même permis d’aller exceptionnellement à l’hôtel, à Verdun et à Bourg-Saint-Maurice. C’était quand il pleuvait trop, afin que mes affaires sèches. J’ai aussi dormi chez des amis et de la famille en cours de route », rapporte-t-il.
« A part une fois où on m’a fait comprendre que je devrais me débrouiller, l’accueil dans les campings était très bon et le personnel me trouvait un endroit bien adapté pour la pose du hamac. Sur place, je rechargeais grâce à un adaptateur pour prise P17 bleue », témoigne-t-il.
« Je m’attendais bien à vivre des galères pendant mon périple. Elles sont arrivées en particulier avec la météo. Les 3 ou 4 premiers jours, par exemple, j’ai connu la pluie et le froid. Ce qui s’est traduit par une baisse terrifiante de l’autonomie. Je n’avais plus 220 km, mais 150 voire même seulement 130 km », se souvient Stanislas Gouhier.
« A l’inverse, j’ai enduré des températures de l’ordre de 40° C entre la Bretagne, Bordeaux et Toulouse. La batterie n’a pas apprécié et a dû surchauffer, même si le système électronique de la moto ne l’a pas signalé. J’ai alors essuyé des blocages de recharge. Parfois, ça ne fonctionnait pas avec les câbles Type 2 et domestique, mais le plus souvent ça finissait par démarrer avec ce dernier », poursuit-il.
« J’avais préparé à l’avance mes arrêts pour le ravitaillement en énergie, en utilisant Chargemap qui est l’application la plus fiable et à jour pour le faire. Il m’a fallu 2 ou 3 fois effectuer des arrêts non planifiés à cause de l’autonomie écourtée. J’ai d’ailleurs été très bien accueilli une fois par un monsieur qui met à disposition des wallbox pour se dépanner. Il avait aussi une tireuse à bière dans son garage », met-il en avant.
« J’étais parti avec l’idée que je rencontrerais certainement des problèmes avec les bornes de recharge installées dans les villages, et que ça se passerait bien dans les villes et surtout les grandes villes. J’ai connu tout le contraire finalement », expose Stanislas Gouhier.
« Dans les villages, les bornes se repèrent en général facilement car elles sont souvent sur la place de la mairie ou d’une église. Les habitants ont généralement de quoi recharger chez eux leurs véhicules électriques. Ce qui fait que le matériel dans l’espace public est peu utilisé. Il était opérationnel chaque fois que j’en ai eu besoin », se réjouit-il encore.
« Dans les grandes villes, le nombre de bornes est souvent insuffisant, entre autres difficultés. A Berne, par exemple, celle de l’auberge de jeunesse n’avait jamais été activée, la suivante était inaccessible car dans une rue en travaux, et celle de l’hôtel où je suis allé ensuite ne fonctionnait pas », illustre-t-il.
« A Brest, la première borne était hors service, une autre était dans une zone industrielle sans rien autour. C’est à Bordeaux que j’ai connu le pire, avec les 8 premières bornes occupées ou non fonctionnelles. Il y en avait même une encore avec une prise Marechal [NDLR : Utilisable avec les VE de 1996 à 2002 équipés de batterie nickel-cadmium] », déplore-t-il.
« J’ai avancé par étapes de 300-400 km. La plus courte, environ 160 km, c’était entre Montpellier et Alba-la-Romaine. Et la plus longue : entre Vannes et Bordeaux. La plus longue mais aussi la plus pénible. J’avais prévu 9 heures pour elle, et finalement je suis arrivé vers 23 heures en partant le matin à 10 heures », oppose Stanislas Gouhier.
« En périphérie de Nantes, ça s’est bien passé. A Fouras, près de La Rochelle, celle de l’hôtel ne fonctionnait pas. J’ai réussi à en trouver une à côté. Je suis arrivé à Rochefort vers 14 heures sous la chaleur. Je n’ai pu recharger qu’à une puissance de 3 kW ou lieu de 12 », aligne-t-il.
« Ensuite je suis passé par une zone moins bien pourvue en bornes. J’ai dû rouler à 30 km/h pour parvenir chez Lidl avec 2 km d’autonomie restante. J’ai n’ai pu démarrer qu’avec la prise domestique. Je suis resté là 2 h 30 alors que le magasin était fermé », revoit-il.
« La moto s’est merveilleusement bien comportée sur la route. C’est un véritable plaisir que de conduire cet engin-là ! Parfois, à des feux rouges, j’ai pu discuter avec des motards pas vraiment prêts à passer à l’électrique. Mais c’était sympa, avec des appréciations positives. Ils m’ont posé des questions sur l’autonomie, la recharge, le prix, comment ça se conduit et les sensations qu’on éprouve au guidon », marque Stanislas Gouhier avec satisfaction.
« Au bout d’une heure trente sur la selle, on a quand même envie de se poser. Ca correspond heureusement aux arrêts pour la recharge. Je referais volontiers un tel voyage. Si c’était en voiture, ce serait avec un modèle doté d’au moins 300 km d’autonomie sur autoroute. Ce que j’ai évité avec la moto. Ces 300 km me permettrait de rouler environ 2 heures avant la pause », réfléchit-il.
« J’ai l’impression que, par rapport au sud, le nord de la France est mieux pourvue en bornes que je trouve espacées d’une vingtaine de kilomètres », chiffre-t-il. « Je conseille à ceux qui ont une moto électrique de tenter cette aventure, en préparant bien à l’avance les étapes pour recharger et se poser », conclut le jeune motard suisse.
Cleanrider et moi-même remercions beaucoup Stanislas Gouhier pour avoir accepté de répondre spontanément à nos questions et l’envoi des photos d’illustration.
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Interview10 novembre 2024
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