Imaginez un monde dans lequel chaque besoin de déplacement aurait une réponse adaptée. Un monde dans lequel ce n’est plus à l’humain de se conformer à la solution, mais à la solution de s’adapter à l’humain, afin d’effectuer la tâche de la meilleure des façons. Ce monde existe, c’est le nôtre. Mais, pour une raison mystérieuse, nous préférons gifler ces solutions plutôt que les embrasser. Comportement, jugement et gouvernement forment un brelan d’absurdités qui brandissent le drapeau écologique sans faire preuve de la moindre logique.
Les choses commencent par l’essai d’un vélo à assistance électrique. Une assistance très généreuse, puisqu’à l’aide d’une gâchette, ce vélo nous affranchit de pédaler. Il n’est alors plus un vélo. C’est un objet illégal sur voie publique. L’absence de pédalage le rend dangereux, hors-la-loi, menaçant. Mais, retirez-lui les pédales et ce qui se transforme en « cylomobile léger » est par magie autorisé, sain, vertueux. Enfin pas depuis longtemps.
Avant le 7 février 2022, la draisienne était bannie. Vade retro satana ! Vendue presque sous le manteau, sur les sites à marketplaces, elle était le symbole du partisan du moindre effort. Pointée du doigt par les cyclistes qui râlaient, considérant que sa place était sur la route, avec les scooters et non sur la piste cyclable. Sur LEUR piste cyclable. Loin d’un coup de tonnerre, c’est un petit décret, émis en « lousdé » qui tout à coup offert à ces engins l’accès à ces pistes chasse gardée. Désormais légale et toujours accessible dès 14 ans, contre 12 auparavant (soit le même âge qui celui qui vous largue dans une voiture bridée à 45 km/h au milieu de la circulation urbaine), elle n’est finalement pas si mortelle. On pourrait aller gratter quelques statistiques pour vendre de la peur dans les médias et des scooters en concessions, mais ce serait tromper autant que se tromper. Absurde ? Oui. D’ailleurs, les trottinettes électriques étaient dans le même bain. Et avant cette date, installer un siège dessus les transformait en cyclomoteur et les empêchait d’accéder aux voies cyclables.
Alors, les utilisateurs d’autres engins de déplacement rongent leur frein et orientent leur rage vers les trottinettes électriques. C’est que les « utilisateurs font vraiment n’importe quoi, c’est hyper dangereux ». Des propos tenus par ceux qui ne s’en sont jamais servi. Souvent suivi d’un « À Paris, ils les ont même interdites, ces trottinettes ». Paris étant une ville exemplaire évidemment a eu recours à un artifice empêchant la majorité des utilisateurs (les mineurs et les touristes) de s’exprimer au profit de ceux qui n’ont jamais mis un pied sur un deck et qui se sentaient mis en danger. Malheureusement, là encore, il n’y a pas grand-chose à se mettre sous la dent. 1525 personnes sont mortes en voiture, pour 707 motards, 440 piétons, 226 cyclistes et seulement 42 utilisateurs d’EDPM, engins qui regroupent les gyroroues, les draisiennes (donc les cyclomobiles légers) et les trottinettes électriques.
Donc le cycliste l’accepte. Enfin cycliste… Utilisateur de VAE. Ce n’est pas pareil. Il y a les vrais. Ceux qui pédalent, été comme hiver, puisent dans leurs ressources, soufflent, souffrent. Ceux dont chaque mètre parcouru est un mètre sain et mérité. Puis, il y a les autres. Les fainéants, les feignasses, les ambassadeurs de l’assistanat. Pas fichus de lâcher une goutte de sueur pour ne pas salir leur costume Zara trop cintré. « Ce n’est pas en usant des batteries qui exploitent les enfants dans les mines que nous sauverons le monde ». Pourtant, les 300 à 500 Wh embarqués sur un VAE ne sont qu’un centième de la capacité de la batterie d’une petite voiture électrique. Puis ces VAE ne dépassent jamais les 25 km/h de l’assistance. Certains s’y sont essayés, avant d’abandonner. Le différentiel d’énergie est trop important pour gagner ces trois malheureux km/h.
Dans l’univers des cyclistes, il y a les routes et les gravels. Ces lascars en cuissard qui se croient dans une épreuve du TDF. Ils filent droit, même quand il faut tourner. Ils filent droit, alors qu’il faut s’arrêter. « Pourquoi faire ? La route est autant à moi que la loi avec moi. Je suis une personne vulnérable de la route, moi ! ». Ces excités de la pédale qui entachent le drapeau de la mobilité à chaque violation du Code de la route. C’est qu’il ne faudrait pas faire baisser leur moyenne. Les pistes cyclables collées aux trottoirs sont leur territoire et malheur au piéton qui osera s’y aventurer.
Au milieu de ces confrontations fratricides du camp de sauvegarde de la planète se trouve toutefois un combat commun. Celui qui, tel l’anneau de Fredon, les lie dans les ténèbres : la voiture, l’automobile, la source de tous les maux. Elle qui symbolise l’individualisme, le capitalisme et tout qualificatif péjoratif en « isme ». Menée de main de maître par les conducteurs. Eux, si parfaits, qui ne forcent jamais un rouge, n’oublient jamais un clignotant, n’obstruent jamais un carrefour et ne grillent jamais une priorité. Eux qui préfèrent se crever les yeux que les lever de leurs smartphones. Ils ont mis les usagers de la mobilité d’accord.
Mais le vélo a gagné du terrain. Populaire, il rencontre des problèmes similaires à ceux rencontrés par l’automobile. Une ville a même choisi d’appliquer un décret pour contraindre le stationnement des biclous, générant un « Cheh ! » monumental de la part de ceux toujours pointés du doigt et une interrogation de la part de ceux à qui l’on n’a jusque-là rien refusé. C’est qu’elle fait mal la première fessée infligée par la vie à l’enfant roi.
En attendant, nous sommes toujours huit milliards d’individus dans le monde dont 448,4 millions en Union européenne. UE qui s’est autoproclamée sauveuse de la planète, mais qui trouve tous les bâtons possibles à mettre dans ses roues, à coup de législation grotesque et de réactions absurdes, saupoudrées d’une peur irrationnelle et d’informations biaisées servant à illustrer les faux propos de politiques en mal de popularité. Plutôt que d’œuvrer de la meilleure des façons pour aboutir à l’idée initiale de sauver le monde, une idée un poil prétentieuse. Elle est bien aidée par ses habitants, qui jouent au plus méritant. Ils font part d’un égocentrisme qui ne rechigne pas à limiter les libertés, tant que ce sont celles des autres.
C’est dommage, parce qu’on n’a jamais connu de période aussi propice à l’adaptation des usages et si favorable à un vivre ensemble. Le cycliste d’aujourd’hui qui sera l’automobiliste de demain qui était le jeune piéton d’hier. Les alternatives, certes un peu exclusives, sont jouissives et pratiques. Il sera toujours facile de blâmer un objet plutôt que ses utilisateurs. Et les statistiques ont prouvé qu’une poignée d’utilisateurs déteint systématiquement sur les autres. En attendant, ces solutions pratiquées par plusieurs millions de personnes en France, solutions dangereuses si l’on en croit ceux qui ne les connaissent et ne les utilisent pas, sont statistiquement les moins mortelles et les plus vertueuses, si toutefois cela contribue véritablement à améliorer la planète.
Quant à la loi, elle a la fâcheuse manie d’attendre un cas grave pour réduire drastiquement les libertés à coups de jurisprudences, laissant dans le flou ce qui ne pose pas encore problème. C’est dommage, car bon nombre de trottinettes roulant à 45 km/h auraient leur place sur la route, avec une plaque. Quant aux speedbikes, ils évoluent déjà, camouflés, sur les pistes cyclables. En quoi une gâchette d’accélération n’est-elle pas compatible avec des pédales et pourquoi infliger aux piétons des vélos sur des pistes dans le prolongement de leurs trottoirs et des voitures aux gens qui tournent entre 20 et 30 km/h en moyenne ?
Parce que vue d’ici, mère Nature n’est qu’un prétexte servant un idéal politique qui n’en a que faire. Car si ce n’était pas le cas, la nature n’aurait pas un prix et les décisions qui toucheraient les moyens de transport et les véhicules œuvreraient pour être logiques, au lieu de prétendre être écologiques.
Quant aux utilisateurs, nous avons plus l’impression d’assister à un débat où chacun d’eux cherche à avoir raison, plutôt qu’à trouver les plus adaptées des solutions. Il n’y a qu’à voir les réactions envers un vélo doté d’une gâchette d’accélération.
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